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[BurtRey] NDL : Aharon APPELFELD, L'Amour, soudain

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Très grand écrivain et très, très beau roman : onze becquets ! et encore, il faudrait citer pratiquement tout le dernier chapitre :

"L’attitude qu’elle avait par rapport à son activité était des plus humiliantes : au fond d’elle, elle le méprisait, car on n’a pas à écrire pour des tiroirs. Si on ne peut pas publier, on n’écrit pas."
(p. 17)

"De longues années il a tenté de reconstituer sa vie, mais écrire une histoire, semble-t-il, n’est pas une bagatelle. Tantôt le « quoi » est un obstacle, tantôt le « comment », et, le plus souvent, les deux vous front échouer ensemble. Cependant, il est des jours où l’écriture est fluide, un mot se lie à un autre, une expression à une autre, et un passage acceptable surgit enfin. C’est un miracle, et des miracles de cet ordre n’ont pas toujours lieu."
(p. 23)

"Chaque nuit les visions reviennent s’offrir à lui. Parfois elles sont si nettes et si fortes qu’elles refusent de se parer de mots. Ernest sait que sans mots justes les visions disparaîtront, comme si elles n’avaient jamais existé. Il s’efforce de la capturer."
(p. 167)

"Une fois, il lui avait dit : « La vérité n’est pas suffisante, elle doit revêtir des mots justes. S’il n’en est pas ainsi, elle court le risque d’être perçue comme une pose ou, pire, comme une hypocrisie. »".
(p. 170)

"— Écrire, c‘est faire surgir des choses de l’oubli ? s’étonna Iréna.
— Manifestement, oui.
— Qu’y a-t-il encore en nous que nous ignorons ?
— Qui sait ?"
(p. 196)

"L’expression du visage du père avait été soudain comme un miroir pour Ernest. A présent il voyait avec précision combien sa propre expression ressemblait à celle de son père."
(p. 212)

"Les douleurs torturent sa chair mais Ernest n’est pas un homme malheureux. La présence d’Irina, sa proximité, lui ouvre des couloirs vers des mondes qu’il n’a pas connus, ou qu’il a connus mais dans lesquels il était aveugle. Il ne s’était jamais représenté un tel amour."
(p. 222)

"Et plus encore : il considérait ses derniers écrits comme un travail commun avec elle ; elle ne l’avait pas seulement aidé jour après jour, heure après heure, elle avait été l’esprit qui animait son écriture. C’est pour cela que si ce manuscrit était un jour publié, il faudrait inscrire sur la couverture « Ernest et Iréna Blumenfeld ». C’était clairement sa volonté."
(p. 225)

"Il espérait qu’un jour, peut-être à la retraite, il commencerait à écrire."
[…]
Ernest ne lui cacha pas que de longues années il avait erré dans des champs qui n’étaient pas les siens, mais ces dernières années il avait découvert un réservoir d’eau vive enfoui en lui."
(p. 227)

"Il lève la tête, observe Ernest et pense : Cet homme est si malade, et pourtant il n’est pas perdu dans le monde. Il ne prêche pas, ne fais pas semblent d’être un érudit, il travaille, et est heureux dans son travail."
(p. 228)

"Une écriture juste doit être comme la chemise paysanne de Grand-père : en coton simple, sans ornement, confortable. Une fois, Grand-père lui a dit que dans la Torah il n’y avait pas un mot de trop, que chaque mot était compté, à sa place."
(p. 229 ; il faudrait citer tout le dernier chapitre)

APPELFELD (Aharon), Valérie ZENATTI (trad., de l’hébreu), L’Amour, soudain, [Pit’om ahava],Paris [Jérusalem], éditions de l’Olivier, Le Seuil [éditions Keter], 2004 [2003], 240 p.

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